Radioactivité à Gueugnon (71) :
le conseil municipal doit trancher le 14 mai 2009
COMMUNIQUE DE PRESSE – 13 MAI 2009
La municipalité doit décider, demain 14 mai, si les déchets radioactifs resteront, ou pas, dans le sous-sol du parking du stade de foot.
– « Le scandale de la France contaminée »
Tel était le titre de l’émission « Pièces à conviction » diffusée le 11 février dernier. Elle s’ouvrait sur le dossier du parking radioactif : « Notre enquête commence à Gueugnon, en Saône-et-Loire. Nous sommes ici à quelques mètres du stade de football. Les soirs de match, tous les supporters viennent ici. Pourtant l’un des deux parkings sur lesquels ils se garent est contaminé. Radioactif. »
En effet, des contrôles effectués par le laboratoire de la CRIIRAD et confirmés par la DRIRE avaient mis en évidence des niveaux d’irradiation anormaux sur l’ensemble du parking. Il faut dire que près de 25 000 tonnes de déchets radioactifs ont été enfouis, en vrac, dans le sous-sol. Il s’agit de résidus provenant du traitement du minerai d’uranium et produits par l’ancienne usine Cogéma, implantée à proximité, sur la rive droite de l’Arroux. Ce dépôt n’a pas d’existence légale et contrevient aux règles de gestion en vigueur : les déchets ne sont pas conditionnés et rien ne les protège de la lixiviation par l’eau de pluie ou des remontées d’eaux souterraines.
– Enlèvement des déchets radioactifs ou simple recouvrement ?
A la demande de la DRIRE, deux options ont été définies par AREVA (Cogéma), c’est-à-dire par le producteur des déchets :
– Pour un coût de 700 000 €HT : la décontamination complète du parking sud : le décaissage et le transfert de 33 000 m3 de résidus et le comblement de la cavité par des matériaux non radioactifs. Le règlement du problème est définitif.
– Pour un coût de 350 000 €HT, finalement porté à près de 500 000 €HT : le décapage superficiel des emplacements les plus actifs (enlèvement de 1 200 m3 de résidus) et le recouvrement du parking par une couche de matériaux neutres et 5 cm d’enrobé. Le traitement du problème est provisoire et limité : l’irradiation induite par les produits radioactifs ne devrait plus être perceptible en surface mais les 25 000 tonnes de déchets restent dans le sous-sol.
L’Administration n’ayant rien imposé à Areva, c’est logiquement l’option la moins onéreuse que l’exploitant s’est proposé de mettre en œuvre.
– La réunion du 21 avril 2009
Lors de la réunion de la CLIS[1] qui s’est tenue à la sous-préfecture de Charolles, le président de la CRIIRAD a défendu l’option du retrait total des déchets radioactifs. En effet, le recouvrement par une couche d’enrobé n’a rien d’une solution pérenne… surtout en regard de la « durée de vie » de ces déchets qui se compte en centaines de milliers d’années. L’option « recouvrement » ne fait que reporter le problème à plus tard (15 ans ? 20 ans ?) et il incombera alors à la collectivité, et non plus au pollueur, d’assumer les dépenses. Il est dans l’intérêt de la population que la décontamination soit totale. Le président de la CRIIRAD soulignait par ailleurs que la révision à la hausse des estimations rapprochait le coût de la solution définitive (700 000 €HT une fois pour toute) de celle du simple recouvrement (500 000 €HT avec des travaux à renouveler régulièrement sur des milliers d’années !).
Au plus fort de la réunion, le représentant d’AREVA a semblé prêt à reconsidérer la position de l’exploitant … mais le maire de Gueugnon bloquait alors toute possibilité de négociation : selon lui, dans la mesure où plus rien ne serait détectable en surface, où le site serait goudronné et entouré d’une « belle palissade en bois », les déchets radioactifs pouvaient bien rester dans le sous-sol !
– La responsabilité du conseil municipal
Il reste encore une chance. Le jeudi 14 mai au soir, le Conseil municipal de Gueugnon se réunit et doit se prononcer sur le dossier. Lors de la réunion du 21 avril, la CLIS s’est déclarée en faveur des travaux mais sans préciser lesquels : enlèvement des déchets ou simple recouvrement. Il est encore possible d’organiser la décontamination totale du site.
o Soit les élus retiennent cette option et la page du parking radioactif peut enfin se tourner.
o Soit ils acceptent que les déchets radioactifs restent dans le sous-sol et le dossier va rebondir tant sur le plan administratif que judiciaire. Ils prennent alors le risque de perdre l’usage du parking… tout en conservant les déchets radioactifs ! Les responsables devront expliquer à la population pourquoi ils ne se sont pas battus pour obtenir l’enlèvement des déchets et garantir l’usage du parking.
– La transformation du parking en installation de stockage de déchets radioactifs !
En effet, interpellée par la CRIIRAD sur la présence illégale des déchets radioactifs dans le sous-sol du parking, la DRIRE a annoncé qu’elle régulariserait la situation en incluant le parking dans le périmètre de l’installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE).
Le parking devrait donc être inscrit sous le numéro 1735 de la nomenclature des ICPE, qui regroupe les installations de dépôt, entreposage ou stockage de substances radioactives sous forme de résidus solides de minerai d’uranium, de thorium ou de radium ainsi que leurs produits de traitement.
Or, il s’agit d’une modification très importante apportée à l’ICPE existante et qui nécessite le dépôt d’une nouvelle demande d’autorisation avec enquête publique et étude d’impact (cf. notamment l’article 512-33 du code de l’environnement). Dans le cadre de cette procédure, l’accès du public à l’ICPE sera nécessairement examiné : l’utilisation d’une installation à risque en tant que parking ouvert au public constituerait en effet un précédent inquiétant.
Par ailleurs, des recours seront introduits contre la décision de l’Administration de « régulariser » une situation de pollution par un simple jeu d’écritures au lieu de traiter le problème sur le fond. La procédure envisagée par la DRIRE vise en effet à transformer un site contaminé en stockage dûment autorisé au titre de la rubrique 1735 de la nomenclature des ICPE.
Au-delà du cas de Gueugnon, cette « gestion » des sites pollués créerait un précédent extrêmement dommageable pour la défense des intérêts environnementaux et sanitaires. Si ce projet est mené à terme, la CRIIRAD espère pouvoir compter sur une mobilisation au niveau national, tant de l’opinion publique que du milieu associatif.
[1] Commission Locale d’Information et de Surveillance.