15/05/2024 – Démarrage de l’EPR de Flamanville : le pari à haut risque de l’autorisation

Sans surprise, le 7 mai 2024, l’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire) a autorisé le démarrage de l’EPR de Flamanville. Dès le lendemain, EDF a annoncé le début du chargement du combustible nucléaire dans le cœur du réacteur en vue d’une connexion au réseau électrique national “prévue à l’été 2024”. Le président de la République doit visiter le site prochainement à l’issue de la fin du chargement du combustible.

Malgré l’euphorie de certains, la réalité est préoccupante. Au-delà des conséquences économiques liées à un retard de douze ans et un budget de construction et de mise en service qui dépasse 19 milliards d’euros (frais financiers inclus), il faut rappeler que l’EPR ne fonctionnera jamais correctement.

L’accumulation des défauts de conception et de construction, la multiplication des malfaçons, “aléas”, réparations, bricolages, modifications “de dernière minute” sont déjà et vont être à l’origine d’une production accrue de déchets radioactifs, d’une augmentation de l’exposition des travailleurs aux rayonnements ionisants, d’une baisse des performances économiques et d’une diminution des marges de sûreté.

Au sein même d’EDF, ou de bureaux de contrôle externe, des salariés souhaitant garder l’anonymat pensent qu’il aurait été préférable de ne pas démarrer ce réacteur tant les défauts sont nombreux et la précipitation déraisonnable.

Mais pour certains responsables1, le réacteur doit démarrer coûte que coûte. “Industriellement, malgré toutes les vicissitudes connues sur le chantier, c’est important de mettre en service pour démontrer qu’on est allés au bout”.

Cette course en avant se fait au détriment de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.

Si l’EPR de Flamanville “démarre” effectivement courant 2024, ce sera avec une série de problèmes majeurs pourtant pointés (mais sans effet) lors des consultations publiques : des fluctuations hydrauliques non résolues fragilisant les assemblages de combustible et induisant des variations de flux neutronique, un couvercle de cuve qu’il faudra changer après quelques mois, ce qui en fera un déchet radioactif non prévu et dont la gestion augmentera l’exposition des travailleurs.

>> En savoir plus sur les défauts du plenum inférieur et du couvercle de la cuve de l’EPR


Contact :

Bruno CHAREYRON, ingénieur en physique nucléaire, conseiller scientifique à la CRIIRAD
Mail : bruno.chareyron@criirad.org


Ressources complémentaires :


  1. Propos de l’adjoint au Délégué interministériel au Nouveau Nucléaire, rapportés par la Presse de la Manche le 3 février 2024. ↩︎

Photo : Centrale nucléaire de Flamanville en 2023 © JKremona – licence CC