Au moins 9,6 millions de personnes sont concernées
Le tritium est le principal produit radioactif rejeté dans l’environnement par l’industrie nucléaire. Dès les années 1990, la CRIIRAD révélait la contamination d’eaux potables autour des sites nucléaires de Marcoule (Gard) et Valduc (Côte d’Or).
Il a fallu attendre 2005 pour que devienne obligatoire la recherche de tritium dans les eaux potables. Les résultats sont consultables par le public mais sur un site archaïque et opaque1. La CRIIRAD le dénonçait en 2019, mais cinq ans après, rien n’a évolué.
Pour y remédier, elle a décidé de mettre elle-même à disposition du public, dans le dossier Tritium dans l’eau potable, les résultats qu’elle a extraits des bases de données officielles2. Voici les principaux enseignements de ce travail.
Les secteurs les plus impactés comptent 663 communes et 9,6 millions d’habitants : le tritium y est détecté à au moins deux reprises, et l’activité maximale atteint ou dépasse 10 becquerels par litre, valeur au moins 5 fois supérieure au bruit de fond. En élargissant à la totalité des résultats pour lesquels le tritium est détecté, ce sont 2 392 communes comptant 16,6 millions d’habitant·es qui sont concernées.
Le tritium est surtout mesuré dans des agglomérations situées le long ou à proximité de cours d’eau dans lesquels une ou plusieurs centrales nucléaires rejettent, en amont, des effluents radioactifs. Sont notamment concernées 290 communes d’Île de France alimentées par la Seine (dont Paris, Créteil, Versailles…), les vallées de la Loire (Nantes, Angers, Tours, Orléans…), du Rhône (Lyon, Bollène), de la Garonne (Agen, Marmande) et de la Vienne (Châtellerault).
Le tritium est également détecté dans 77 communes de Côte d’Or, département où se trouve le centre CEA de Valduc, lieu de fabrication des armes thermonucléaires. Il s’agit du site qui, de loin, rejette le plus de tritium en France par voie atmosphérique.
En dehors de ces principaux secteurs, de nombreuses communes présentent de façon ponctuelle une contamination en tritium dont l’origine reste à déterminer. La CRIIRAD invite toutes les personnes intéressées à enquêter, en se servant des données qu’elle met à disposition.
Par ailleurs, l’ampleur du phénomène est sous-estimée. En effet, la grande majorité des analyses réalisées ne sont pas suffisamment précises pour mettre en évidence un impact des rejets actuels des installations nucléaires. De plus, pour près de 4 000 communes, la base officielle ne comporte aucun résultat, ce qui constitue autant d’infractions potentielles à l’obligation de contrôle.
La demande faite par la CRIIRAD en 2019 reste valable : il est nécessaire de documenter toutes les communes alimentées par de l’eau potable contaminée par le tritium.
Il est plus que temps de revoir les normes en vigueur qui ne sont pas assez protectrices, d’autant plus que les rejets dans l’environnement vont augmenter avec la construction de nouveaux réacteurs nucléaires.
Pour en savoir plus :
- https://urls.fr/PTn-wD ↩︎
- Téléchargeables sur https://urls.fr/4r2A5M ↩︎